1 + 1 = TOUT - Veillée de Noël
1 + 1 = TOUT
Méditation de la Veillée de Noël du 24 décembre 2024, par la pasteure Sophie Ollier, avec le conte La soupe aux cailloux par le pasteur Christian Baccuet
Texte biblique : Luc chapitre 2, versets 1 à 20
Conte : La soupe aux cailloux
La soupe aux cailloux, par le pasteur Christian Baccuet
Il était une fois un petit village, dans la montagne, un peu isolé.
Dans ce village, les habitants se méfiaient les uns des autres.
Ils ne savaient pas pourquoi, ni à quand cela remontait, mais ils vivaient chacun chez soi, en évitant de se croiser, en évitant de se parler, en évitant de se regarder.
L’ambiance était froide, fermée et hostile.
C’était l’hiver dans leur cœur, et c’était l’hiver autour d’elles.
Le soir de Noël, au cœur de l’hiver, tandis que tombaient les flocons de neige, un homme arriva dans le village.
Aucun bruit.
Personne dehors.
Des maisons aux fenêtres éteintes, même si, derrière les rideaux tirés, on devinait des regards méfiants.
Vous pensez bien, un étranger au village, cela ne peut qu’apporter des complications !
Le soir tombait et c’était triste.
L’homme vit qu’il y avait une marmite vide, abandonnée dans un coin.
Il la prit et la posa au milieu de la place du village.
Les gens observaient derrière leurs rideaux tirés.
Il la remplit de neige.
Les gens observaient derrière leurs rideaux tirés.
Il alla chercher quelques banches de bois mort et fit un feu sous la marmite.
Les gens observaient derrière leurs rideaux tirés.
Quand la neige fut fondue, il prit trois petits cailloux qu’il avait dans la poche et les mit dans la marmite.
Les gens observaient derrière leurs rideaux tirés.
L’eau se mit à bouillir et de la vapeur montait de la marmite.
L’homme se pencha sur la marmite, sourit, et s’écria :
- Mmhh, cela semble délicieux !
La porte d’une maison grinça.
Un petit garçon sortit de la maison et s’avança prudemment.
Les rideaux des maisons s’écartèrent un peu plus.
Le petit garçon s’approcha de l’inconnu et de sa marmite fumante.
- Que fais-tu, demanda-t-il ?
- De la soupe, répondit l’inconnu.
- De la soupe ?
- Oui, regarde : il y a de l’eau qui bout, et j’ai mis trois cailloux dedans. Je fais une soupe aux cailloux.
- Une soupe aux cailloux ?
- Oui, c’est une soupe dont moi seul ai le secret. Mais il manque du sel et du poivre.
- Il y en a chez moi, dit le petit garçon.
Il courut vers sa maison et revint vite, accompagné de sa mère.
L’inconnu prit le sel et le poivre et les mit dans la marmite.
Derrière lui, des pas se firent entendre sur la neige froide.
C’était une vieille dame qui s’approchait pour voir ce qu’il se passait.
L’inconnu dit :
- Cette soupe serait meilleure si on y ajoutait des carottes.
- J’en ai chez moi, dit la vieille dame.
Et elle s’empressa d’aller les chercher.
Quand elle revint, il y avait deux autres personnes autour de la marmite, un bûcheron et un paysan.
- Si on avait aussi des poireaux, cela améliorerait bien cette soupe, dit l’inconnu.
- Je vais en chercher chez moi, dit le paysan.
- Et moi je vais ajouter des patates, dit le bûcheron.
Et voilà que d’autres portes s’ouvraient, et d’autres personnes s’approchaient.
Une couturière, un menuisier, le facteur, l’épicière, et quelques autres encore.
La soupe commençait à sentir bien bon.
- Moi je vais ajouter un chou !
- Et moi du lard fumé !
- Et moi des saucisses !
- Et moi de la crème !
Et chacun allait chercher chez lui de quoi améliorer la soupe aux cailloux.
L’air s’emplissait de plus en plus de la délicieuse odeur de la soupe.
- Nous allons chercher des assiettes, s’écria un vieux couple.
- Et nous, nous apportons des verres et des boissons, dit un jeune couple.
- Et moi je donne du pain qui sort du four, dit le boulanger.
- Et moi j’ouvre la salle commune, il y fait meilleur que dehors, dit le maire.
- Venez avec moi chercher des tables et des bancs à l’école, dit l’institutrice.
- Moi j’installe des lampions !
- Et moi j’apporte des fleurs !
- Moi une guitare !
- Et moi je vais chercher le vieux Jacques qui ne sort jamais !
Et chacun de courir, de s’affairer, heureux de bientôt pouvoir déguster la soupe aux cailloux.
Délicieuse soupe aux cailloux, dans la chaleur de la salle commune !
Dans la chaleur de la fête et de la musique.
Et bientôt tout le monde chanta, et bientôt on dansa.
On n’avait jamais vu cela dans le village.
On se regardait, on se souriait, on riait.
Il faisait chaud dans les cœurs.
- Mais, dis-moi, quel est le secret de la soupe aux cailloux, demanda le petit garçon à l’inconnu.
L’inconnu sourit délicatement.
- Trois petits cailloux… et de la confiance à partager.
Et, tandis que la fête battait son plein, il reprit tranquillement sa route.
Depuis, le village n’est plus le même.
Le souvenir de cet inconnu et de sa soupe aux cailloux enchante le cœur des habitants.
Ils aiment faire mémoire de ce soir de Noël, quand leur village mort est redevenu vivant.
Ils se retrouvent régulièrement pour déposer au fond de la marmite les trois cailloux que l’inconnu leur a laissés.
Ils font bouillir de l’eau et chacun y rajoute un petit quelque chose, puis, ensemble, ils la dégustent, discutent, chantent, dans la joie et la confiance retrouvées.
Ils s’invitent même les uns chez les autres.
On dit même que certains se retrouvent tous les dimanches !
Et même que certains y pensent tous les jours.
Ils se souviennent de l’inconnu qui est passé ce jour-là avec ses trois cailloux.
De ce qu’il a laissé.
De ce que l’on partage.
Trois petits cailloux de rien du tout.
Trois petits cailloux, la foi, l’espérance et l’amour, et tout est changé.
Méditation : 1 + 1 = TOUT, par la pasteure Sophie Ollier
Et oui, un porteur de foi, d’espérance et d’amour qui rassemble autour de lui et fait repartir emplit d’espérance et de bénédictions ?! N’est-ce pas là ce que nous vivons à Noël, ce que nous célébrons, ce à quoi nous sommes appelés ?
Noël, ce moment où Dieu se fait homme pour nous offrir la foi, l’espérance et l’amour dans l’être le plus humble qui soit : un enfant tout juste né.
Mais comment, à travers le brouhaha des fêtes, pouvons-nous accueillir cette paix et cette lumière dans notre vie ? Le conte La soupe aux cailloux nous offre une belle image de la manière dont, parfois, nous pouvons expérimenter la générosité de Dieu, même à partir de peu de choses. Ce conte et plus encore le texte biblique que nous avons lu, nous rappellent que l’espérance existe encore, quand bien même nous sommes dans un monde qui, aujourd’hui, se cloisonne de plus en plus, où chacun se cache derrière sa fenêtre, juge et est méfiant, nous avons besoin de réentendre que cette espérance existe, qu’elle est porteuse de partage et de joie.
Dans une mangeoire, Dieu choisit de se faire présent sous la forme fragile d’un bébé. Un enfant visité, non pas par des puissants, mais par des bergers. Rien dans l’apparence de cet événement n'indique sa grandeur. Pourtant, c'est précisément par cette simplicité que Dieu bouleverse l’histoire du monde et de l’humanité.
Par-là, Dieu nous invite à faire quelque chose avec ce que nous avons, même si cela semble modeste, pour voir comment Il transforme nos "cailloux" en bénédictions.
Nous aussi, dans notre vie quotidienne, nous avons parfois l’impression que notre foi, nos actions, nos prières sont comme ces cailloux : insignifiants et sans impact. Mais cette venue de la Parole incarnée de Dieu en Jésus nous dit que ce qui nous semble pauvre et petit, Dieu peut le transformer. Il prend notre pauvreté, notre fragilité, et il les remplit de sa vie, de sa joie et de sa chaleur.
Qu’est-ce que moi j’ai à apporter à toutes et tous ? Je ne suis pas douée dans un truc en particulier, je n’ai pas énormément de temps, je n’ai pas de talents, et puis qui suis-je pour accompagner, apporter, offrir ? Et pourtant !!! Et pourtant, que ce soit ceux qui ont permis à Marie de disposer d’une mangeoire ou encore celui ou celle qui a amené une carotte dans la soupe… ça compte ! C’est énorme, c’est essentiel ! Être présent, proposer une idée, sentir qu’être là pour l’autre est essentiel, tendre la main à un inconnu, écouter l’autre, être là à un instant T et offrir qui nous sommes !
C’est apporter à la soupe de la vie une foi, une espérance !
Ce qui semble être peu pour nous est puissant pour un autre ! Témoigner d’une lumière par notre être, nos dons, nos talents, c’est déjà énorme ! Tout comme cet enfant dans une mangeoire, ce qui n’est rien devient pour l’autre, le berger, un évangile, une raison de rendre grâce et d’avancer !
Nous apportons ce que nous avons, même si cela semble dérisoire. Et Dieu, dans sa bonté, multiplie ce don. Il transforme nos petites offrandes en une grande joie partagée.
Là où nous voyons des cailloux, Dieu voit une occasion de semer la lumière. Par l'Incarnation, Jésus nous montre que, même dans la pauvreté et l’humilité, il est présent et actif.
Nous pouvons, à notre tour, devenir des instruments de sa générosité. Dans les jours à venir, chaque geste de partage, chaque sourire, chaque parole d’amour que nous offrons à celles et ceux qui nous entourent et que nous croisons est une manière de remplir la soupe de Noël, d’apporter une contribution à la joie universelle qui se déploie en ce jour.
Dieu veut transformer ce qui est en nous, aussi bien nos cailloux de peine et de difficultés, que nos élans de vie, en une grande œuvre de réconciliation et d’espérance, en un élan qui dépasse une simple mangeoire pour devenir un message de vie et de grâce pour ce monde !
Oui, Dieu transforme l’ordinaire en extraordinaire.
Mettre notre talent ou notre personne au service de l’autre c’est déjà mettre des carottes dans la soupe ! Mettre dans ce monde quelque chose qui lui donne du goût et qui est source de rapprochement, de convivialité, de partage ! Et accepter que ma carotte puisse être agrémentée de courgette ou de pomme de terre, de ce qui est différent de moi !
Vous imaginez combien ce monde serait beau et bon si chacun et chacune de nous apportait son ingrédient dans la soupe de ce monde, repartant comme les bergers, en rendant grâce ?! Chacun et chacune de nous + chacun et chacune de nous donne le tout de la lumière de Dieu pour ce monde.
Un autre « caillou », une autre pierre sera plus tard le signe d’une mort mais qui, mise en mouvement, sera le signe de la vie ! La pierre du tombeau qui sera roulée, où cet enfant né dans une mangeoire deviendra l’espérance même de la vie pour ce monde !
Que ce Noël soit pour nous l’occasion de découvrir que, même dans nos moments les plus simples, Dieu est à l’œuvre.
Comme les villageois, soyons ouverts à apporter notre contribution, même si elle nous semble petite ou insignifiante. Et comme ce voyageur, sachons inviter les autres à se joindre à la fête, à la table du Seigneur, où il y a toujours de quoi nourrir tous les cœurs affamés de vie.
Parce que cette nuit encore le Christ naît dans nos cœurs et dans nos vies, dans nos obscurités, rappelons-nous que même les plus petits gestes, quand ils sont portés par la foi, l’espérance et l’amour, peuvent être un moyen de vivre la grande générosité de Dieu qui transforment nos cailloux en une soupe de bénédictions pour nous et pour le monde.
Amen.
Sophie Ollier
A la suite du conte « La soupe aux cailloux »