Dieu et mon brossage de dents ! — Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg - Communion luthérienne et réformée

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg
Menu

Dieu et mon brossage de dents !

Prédication du dimanche 26 novembre 2023, par la pasteure Sophie Ollier

 

Dieu et mon brossage de dents

 

Prédication du dimanche 26 novembre 2023, par la pasteure Sophie Ollier

Lectures bibliques :

  • Matthieu 2, versets 1 à 12
  • Psaume 139, versets 1 à 12

 

 

Dieu et mon brossage de dents, associé au texte des mages ! Original n’est-ce pas ?

Mais surtout, lire le texte des mages à une semaine de l’Avent ? Que c’est étrange !  Merci l’Ecole biblique pour ce choix de thème ! Oui, si vous ne savez pas, on essaye de prêcher sur le thème qu’aborde les enfants le matin, ça fait du lien entre eux et nous. C’est un texte que nous lisons généralement début janvier, que nous relirons d’ailleurs début janvier, après Noël, après la naissance… mais bon, on est là aujourd’hui, ce texte doit bien avoir quelque chose à nous dire même en-dehors de la galette frangipane… La Bonne Nouvelle est pour chaque instant, donc pourquoi pas pour aujourd’hui ?!

Je vais vous avouer que ce texte m’a parlé mais à travers un détail vous allez voir ! Avant cela, reprenons les bases. Surtout, ne regardez pas vos feuilles s’il vous plait, de mémoire, et avec l’imaginaire collectif, on va voir si vous avez suivi :

Comment s’appellent les mages ? Ils ne s’appellent pas. Ils n’ont pas de noms. D’ailleurs dans la traduction que vous avez c’est noté « savants » mais en grec ce sont bien des mages, des astrologues en fait. Je continuerai à parler de mages donc.
Combien sont-ils ? On ne sait pas, ils ne sont pas trois mais plusieurs…
Quels sont les animaux présents ? aucun… seulement Marie et Jésus. (Et d’ailleurs… Joseph ?)
Où les mages trouvent-ils Jésus ? Dans une maison.

Aaaaaah ! La tradition de Noël, qui remonte au 4e siècle de notre ère, avec une étable, des bergers, 3 mages, des animaux partout, a la peau dure !

Et finalement, au milieu de tout ce folklore je me demande si on n’a pas loupé un truc ! Et un mot m’a sauté à la figure ! Dans l’Evangile de Matthieu, les mages trouvent Jésus dans une maison ! Une maison !!  

La maison, c’est le lieu par excellence où le Christ intervient dans les évangiles : il y parle, il y débat, il y enseigne, il y mange, il y guérit, il y convertit.

C’est dans une maison qu’il célèbre la Pâque avec ses disciples. C’est dans une maison qu’il y ressuscite aux yeux des disciples. C’est dans une maison qu’il est découvert par des mages venus d’Orient.

La maison, c’est là aussi qu’est né l’Eglise. Dans la clandestinité. C’est là aussi que le protestantisme a résisté.

Par contre, la maison c’est bien le dernier lieu où l’on cherche Dieu. Nous le cherchons dans le ciel, dans une Eglise, dans la Bible, dans des expériences mystiques, dans des grands miracles… mais pas une maison, pas dans un lieu ordinaire et commun.

Non, Dieu, on ne le cherche pas dans une maison. Pas là où je vis tous les jours. Pas là où je mange, où je fais la cuisine, où je me dispute. Pas là où je dors, où je bricole, où je m’ennuie, où je fais la gueule. Pas là où je regarde la télé en mangeant des chips, pas là où je surfe sur internet, pas là où je vide mon sac en rentrant du boulot, pas là où je me brosse les dents !

Pas là où je peux être enfin moi-même, dire enfin ce que pense, faire enfin ce que je veux ! Et pourtant !!!

Matthieu révèle la « domesticité » du Christ. La révélation a lieu là, en plein milieu du salon, en plein milieu du repas.

L’Evangile selon Matthieu nous révèle que le Christ se trouve dans la banalité de ma vie privée, chez moi, dans toutes mes tâches domestiques qui rythme ma vie.  Que c’est là que je dois le chercher, que c’est là que je dois le rencontrer.

Mais bizarrement nous ne voulons pas qu’il voit ce que nous faisons, disons, croyons, pensons. Et ce n’est pas toujours là que nous pensons en premier à vivre la Parole. Comme si ma maison devait rester hors de portée de Dieu. Comme si ma vie privée ne concernait que moi et que Dieu était à chercher, forcément, ailleurs.

Et pourtant, Matthieu place le Christ au cœur de la maison, de la vie intime, de tous les jours. Celle qui n’appartient qu’à moi justement, ma vie privée. Ce seul endroit qui est « à moi ». Cet endroit où le faux semblant n’existe pas, où je n’ai pas à convenir à tout ce que la société attendrait de moi !

Le Noël de Matthieu, c’est Dieu qui se révèle être dans les gestes, les mots, les silences simples et ordinaires de la vie de tous les jours, dans tous les événements dont les murs de notre maison sont témoins.

Quand tu sors la poubelle, quand tu vide tes courses, quand tu décroches ton téléphone, quand tu râles, quand tu rêves, quand tu bulles, quand tu boudes, il est là, au cœur de ta vie. Pas pour t’espionner et te faire la morale, mais pour vivre la vraie vie avec toi, sans maquillage, sans tabou, sans mensonge, sans artifice !

Mais on a parfois envie de lui fermer la porte à Dieu, de le laisser sur le palier, de ne pas trop le laisser entrer dans le « tous les jours, à chaque instant », parce que la majorité du temps c’est nous avec nous-même, notre peur que Dieu puisse être présent dans nos pensées quotidiennes. Nos fatigues, nos colères, nos réflexions dont on n’est pas toujours fiers, nos trucs qu’on cache à tous, nos gestes, nos paroles, nos pensées que les autres jugeraient… Que c’est difficile de laisser Dieu s’immiscer au milieu de tout ça, du tout de nous. Et pourtant, c’est là que la Lumière est d’autant plus forte comme nous le dit le Psaume 139 que nous avons lu : « pour toi, même l'obscurité n'est pas obscure, la nuit est claire comme le jour, les ténèbres sont comme la lumière ! » (Ps 139, 12). La Lumière ne se voit pas dans la Lumière, mais une lumière ne se voit que dans l’obscurité !

Matthieu montre combien l’Evangile s’enracine dans l’ordinaire de nos vies. Et je trouve cela tout à fait renversant. Peut-être que cela vous parait bateau, mais pourtant, le pensons-nous vraiment comme cela au quotidien ?

Et puis, ça ne fait jamais de mal de nous le rappeler ! Oui, Dieu nous demande d’agir, d’être pleinement dans ce monde et nous essayons, du mieux que nous pouvons, d’aller à la rencontre de l’autre, d’agir pour du beau et du bon, hors les murs de chez nous, mais c’est ce que nous vivons chez nous et en nous à chaque instant qui rayonnera à l’extérieur.

Il y a dans ce texte, de manière fine, un retournement de regard ! Ca nous remet les pieds sur terre, et non plus seulement dans le tout spirituel. Comme les mages, astrologues, les yeux tournés en continue vers le ciel, les étoiles, et qui découvrent finalement l’immensité du sens dans une maison quotidienne !

C’est tout ça : la maison. C’est la ferme, le chalet, l’appartement, le pavillon, la villa, le studio, la maison d’arrêt, la maison de repos, la maison de retraite, la maison de vacances, le cœur de nos vies… où le Christ a élu domicile. C’est chez toi que la Lumière, la Parole de vie, de réconfort, d’envoi, de résurrection, de reconstruction, a rendez-vous aujourd’hui : dans ta vie, dans ton « chez-toi ».

Oui, c’est dans cette vie-là, notre vie de tous les jours, que Dieu se rend présent dans ce monde ! Et surtout, ça nous permet d’entendre aussi que lorsque nous chutons seuls chez nous, il est là ! Que lorsque nous pleurons seuls chez nous, il est là ! Et c’est aussi dans ce quotidien là que nous pouvons pleinement le rencontrer !

C’est aussi ce que nous avons entendu dans le Psaume 139 (v. 2-6) : quand je m’assieds, quand je me lève, quand je suis dehors, quand je suis CHEZ MOI… Cette présence est Lumière ! Cette Lumière qui est la Vie ! En fait, cette présence proche de Dieu se fait au creux de notre intimité, dans nos maisons, et dans nos maisons intérieures !

Lorsque nous sommes fatigués, physiquement, et que nous avons besoin de repos, que faisons-nous ? Nous voulons être chez nous, rester tranquilles, pour nous requinquer ! Pourquoi en serait-il différemment pour notre foi, pour l’espérance que nous avons besoin de retrouver continuellement face à tout ce qui assombrit notre monde ? Ne manquons pas le « tous les jours » de nos vies, même s’ils passent à grande vitesse.

Oui cette Parole faite chair que nous allons célébrer à Noël c’est cette Lumière qui se révèle au quotidien ! Dieu n’a pas rejoint le monde, l’humanité, seulement pour se trouver dans les Eglise, dans des lettres inscrites dans la Bible, il n’est pas seulement venu se révéler dans de grandes expériences de conversions ou que sais-je ! Il est venu pour habiter notre quotidien, partager nos peines et nos joies, nos fatigues et nos élans, nos bouderies et nos entraides ! Il est venu POUR le quotidien de nos vies, dans le quotidien de nos vies ! Cette Parole, cette Lumière a fait sa demeure parmi nous nous dit Jean !

Et pourquoi me direz-vous ? Parce que tout ce que nous sommes est précieux aux yeux de Dieu, nous sommes précieux aux yeux de Dieu ! Et si tout ce qu’on est, est précieux aux yeux de Dieu, alors il ne peut pas se trouver autre part que dans notre « tous les jours ».

Ce fameux « Il est bon que tu existes, tu es précieux à mes yeux », nous permet d’avancer dans la vie, elle nous permet de voir la Lumière là où tout semble sombre, elle nous permet de voir un sourire quand les pleurs sont présents, elle nous permet d’entendre que je suis aimé à chaque instant, pas seulement à quelques moments !

Il y a quelques semaines j’avais prêché sur ce fameux « Il est bon que tu existes », cœur de l’Evangile, de la Bonne Nouvelle ! Cette présence de Dieu dans notre quotidien, dans les tâches et les moments les plus anodins dans nos vies, nous rappelle que ce « il est bon que tu existes » est aussi vrai quand tu es avachi devant la télé, que tu épluches les patates, que tu fais les devoirs avec les enfants, que tu fais tes comptes… Et pas juste quand tu es aux yeux du monde. Et cette présence rend ces temps banals lumineux !! Il aime le tout de nous ! Quel Dieu viendrait nous rejoindre en chair, et en os, si ce n’était pour aimer le tout de notre quotidien, de notre humanité ?

Prêcher, rendre la Parole actuelle, vivante, c’est nous permettre de nous ouvrir au monde qui nous entoure. J’aurais pu prêcher sur les conflits actuels, les lois qui passent en ce moment, la pauvreté qui grandit, les enjeux éthiques de notre société… Mais aujourd’hui c’est cette « maison » qui résonne. Parce que si on ne part pas de nous, le « nous » que Dieu est venu rejoindre, alors on loupe le cœur de l’appel de Dieu pour ce monde : la Lumière qui se répand dépend de nous et de ce que nous vivons de plus banal.

Cette Bonne Nouvelle qui nous est faite aujourd’hui, grâce au thème des mages abordé par les enfants, cette Bonne Nouvelle, comme celle de demain, de Noël, de Pâques, c’est celle-là : le cadeau de la venue de Dieu dans ce monde, dans notre quotidien, pour que nous ayons la vie, pour que nous ne soyons plus seul et isolé, mais que même au creux de notre maison nous puissions sentir et vivre d’une Lumière !  

Et cela peut nous prendre un peu de temps pour entendre que nous sommes chacun et chacune précieux aux yeux de Dieu ! Alors prenons-le ce temps pour entendre cette Parole pour nos vies ! Ce temps de l’Avent qui va s’ouvrir devant nous est une bonne occasion de le remettre au cœur de notre quotidien, d’y penser, ce Dieu qui nous aime pendant notre brossage de dents ! Prenons-le ce temps du quotidien, dans notre maison où Dieu se révèle pleinement ! Et justement, je vous propose de vous mettre au rythme d’une Lumière pour prendre ce temps !

La Lumière d’une bougie ! Peut-être insignifiante cette Lumière au premier abord, mais tellement puissante ! Pendant les jours qui viennent, dans votre maison, prenez une bougie, allumez-là, et regardez cette Lumière vous dire « Pour moi, tu es précieux » ! Oui, cette Bonne Nouvelle est pour nous aujourd’hui et demain.

Alors voilà, cette Bonne Nouvelle au goût de frangipane est vraiment renversante, cette Parole faite chair que nous célébrerons dans quelques semaines est réellement celle de tous les dimanches matin, celle de tous les instants du quotidien, de nos maisons, et cette Parole nous est encore offerte ce matin par Dieu : Il est bon que tu existes, tu es précieux à mes yeux, même quand tu te brosses les dents !  

Amen

Sophie Ollier

Mots-clés associés : , , , , ,