Entrée, plat, dessert ! — Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg - Communion luthérienne et réformée

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Église protestante unie de Pentemont-Luxembourg
Menu

Entrée, plat, dessert !

Prédication du dimanche 17 septembre 2023, par la Pasteure Sophie Ollier. Culte d'installation de la Pasteure Sophie Ollier.

 

Entrée, plat, dessert ! 

 

Dimanche 17 septembre 2023 par la Pasteure Sophie Ollier – Installation liturgique

Lecture biblique : Luc 14, versets 1 à 14

 

 

Voici donc mon culte d’installation ! L’occasion pour nous de faire peu mieux connaissance ! Première chose à savoir sur moi : j’ai un amour tout particulier pour la nourriture et les comparaisons culinaires ! Donc autant prendre un texte qui se passe autour d’une table pour aujourd’hui !

Mais j’ai aussi choisi ce texte car il contient la recette parfaite de l’être ensemble, un peu comme un complément à la prédication à 2 voix que nous avons fait avec Christian ce matin avec le texte d’1 Corinthiens 12 « Vous êtes le corps du Christ, vous en faites partie, chacun pour sa part ». Nous avons prêché sur le fait que nous soyons le corps du Christ, nous, communauté, et avec l’extérieur, chacun et chacune membre de ce corps ecclésial, social où le Christ, la Parole de vie qui est la Lumière des humains, est au centre, et nous fait vivre en cohésion, en unité avec notre diversité ! Mais pour pousser plus loin, je choisis ce texte aujourd’hui !

Alors allons-y ! Comme souvent avec Jésus, encore plus dans l’Evangile de Luc, on a une table, une fête, des invités, de quoi passer un bon moment !

Alors, bien sûr, Jésus ne va pas nous offrir une expérience culinaire dans ces textes, mais avec lui de toute façon il y en a toujours pour le ventre, pour la tête, pour le cœur et pour nos vies !

Et comme pour un vrai repas, il y a entrée, plat dessert ! Une guérison, une parabole, une exhortation ! On commence à être habitué, avoir Jésus à sa table ce n’est pas de tout repos, d’autant plus ici ! Peut-être que c’est pour ça qu’on prie ou qu’on chante de moins en moins avant le repas… peut-être avons-nous peur d’inviter Jésus à notre table qui sait ?!

Mais bon, inviter Jésus à sa table, ça met du piment dans l’assiette ! Les pharisiens et les invités ne pourront pas dire le contraire !

Bon, allons-y, plongeons dans ce texte pour comprendre quelle recette nous donne Jésus ce soir, oui, parce qu’aujourd’hui c’est tout un menu que Jésus nous offre ! En même temps, vous avez eu le temps de lire le titre de la prédication.

D’abord l’entrée !

Et pour une fois, c’est Jésus qui ouvre le bal avec une question : « est-il permis ou non d’opérer une guérison pendant le sabbat ? » lorsqu’un homme atteint d’hydropisie se présente à lui. L’hydropisie est une accumulation d’eau dans le corps. Littéralement, un homme qui se noie dans son propre corps. Bon, normalement on ne guérit pas le jour du sabbat, et il le sait, mais il le fait quand même pour ensuite poser la question aux pharisiens : lequel de vous, si son fils ou son bœuf tombe dans un puits, ne le retirera pas aussitôt, le jour du sabbat ?

Avant même que les pharisiens ne lui posent la question, Jésus prend le contrepied pour leur rappeler, une fois encore, que la loi est là pour guider et faire grandir, non pour faire mourir ! Le sabbat est là pour le repos et la prière mais ne sépare pas l’humain du monde dans lequel il vit. Quelle différence il y a-t-il entre sauver son fils qui se noie dans un puits et un homme qui se noie dans son corps ? Aucune.

Ainsi, en entrée, Jésus nous parle d’honnêteté ! L’honnêteté : ne jugeons pas trop hâtivement quand nous-même nous ne sommes pas dans la situation, et surtout quand l’on sait profondément, soyons honnêtes, qu’on agirait de la même manière si cela nous arrivait… C’est finalement tellement facile de juger, et on fait ça en continu ! Nous sommes dans une société de jugement perpétuel, nous pointons du doigt tellement facilement celles et ceux qui sont à l’autre bout de la planète, dans un autre pays, ou même au coin de la rue. Le SDF n’a qu’à trouver un travail. Le migrant n’a qu’à retourner dans son pays et se battre. Le russe n’a qu’à dire « non » à Poutine. La femme violée n’avait qu’à pas porter de jupe. La femme battue n'a qu’à partir de chez elle. La personne en dépression n’a qu’à décider d’aller mieux.

Soyons honnête dans nos relations aux autres et à ce qui nous entoure, dans notre relation à celles et ceux qui vivent des choses différentes de nous mais qui, pour autant, rejoignent profondément notre humanité. Comment est-ce que moi qui suis une main je pourrais juger de ce que fait un pied ou une oreille ? La critique est aisée, l’honnêteté l’est moins. 

C’est donc l’entrée de Jésus dans le menu du vivre ensemble qui va se poursuivre : l’honnêteté en soi même, déjà de moi à moi.

Passons au plat maintenant, parce que Jésus ne s’arrête pas là ! Il regarde autour de lui et enchaine, sans qu’on lui demande rien d’ailleurs ! Il voit les invités se chamailler les meilleures places au repas ! Alors il y va ! A quoi cela te sert-il de te mettre en avant de la sorte, ce n’est pas toi qui décides de la place que tu occupes dans la vie de quelqu’un ! En gros c’est un peu ce qu’il leur dit ! Jésus aborde cette question de la place que nous prenons face à l’autre, suis-je dans une posture de mise en avant ou suis-je dans une posture d’humilité ? Quand avec les pharisiens il touche à la question de l’honnêteté de soi à soi, là il touche à la question de l’humilité de soi face à l’autre.

Une fois que nous sommes déjà honnêtes avec nous même, nous serons en honnêteté et en humilité face à celles et ceux qui sont en face de nous. Et attention, on ne parle pas ici d’une espèce de fausse humilité du style « Je suis humble et j’en suis fière ». Non. Il n’est pas question d’aller se mettre à la dernière place en se disant qu’on viendra me chercher pour me mettre devant ! Il s’agit d’être face à l’autre et face à Dieu dans une posture qui n’est pas une posture de pouvoir ou de mise en avant. En quoi la main serait-elle plus importante que l’œil, la langue ou la jambe ?

Dans la Bible lorsqu’on aborde la question de l’humilité c’est associé à la question de la modestie mais aussi de se savoir faillible, de se savoir imparfait, de se reconnaître comme étant petit et pourtant profondément et inconditionnellement aimé de Dieu !

Tu es déjà invité à la fête, pourquoi te mettre en avant ? Tu es déjà aimé de Dieu profondément, pourquoi te gonfler d’orgueil ? Cela est directement relié au fait d’être en pleine honnêteté avec soi-même !

Oui, comme je l’ai dit plus tôt, inviter Jésus à sa table ça met de l’ambiance !

On a souvent du mal avec l’humilité dans notre société, surtout que c’est rarement vu comme une vertu malheureusement ! Aujourd’hui, celui qui est humble aura tendance à se faire marcher dessus. On met en avant l’orgueil, le fait de mieux réussir que les autres, d’avoir plus d’argent, d’avoir fait plus d’études, d’avoir un travail qui a « de la valeur » aux yeux de la société, d’avoir des enfants qui réussissent, une belle maison… Et on se gonfle d’orgueil face à celles et ceux qui ne « réussissent » pas selon ces termes-là ! On se gonfle d’orgueil face aux populations qui seraient « moins évoluées » que nous selon ces termes-là !

Quoique, j’ai quand même l’impression qu’on arrive à la fin de ce dictat de l’orgueil, les générations qui arrivent n’en peuvent plus et comprennent combien cet orgueil est en train de détruire ce monde, combien l’humilité face à l’autre et face à la nature devient essentiel ! Je l’espère profondément !

Voici donc le plat, après l’entrée de l’honnêteté, Jésus nous sert le plat de l’humilité !

Alors, que nous propose-t-il en dessert ?

Pour ce dernier temps de repas, Jésus s’adresse directement à celui qui l’a invité : pourquoi invites-tu amis et famille, voisins riches, et pas l’infirme, l’estropié, le mendiant ? Qu’attends-tu en retour ?

Jésus aborde là la question de la générosité et du don ! Donner à celui ou celle qui peut te rendre n’est pas du tout pareil que de donner à celui ou celle qui ne peut pas te rendre. Bien sûr on peut dire qu’on invite des amis à manger sans rien attendre en retour, mais dans tous les cas la situation du donnant-donnant s’installe. Alors que le don pur et dur, la générosité simple, cela ne suppose rien en retour ! On pourrait faire une prédication entière sur ce sujet bien sûr, comme sur les deux premiers vous me direz, mais nous pouvons nous poser cette question pour nos vies, en toute honnêteté et humilité : quelle dose de gratuité est-ce que je mets dans ma relation aux autres ?

Dans le texte d’1 Corinthiens 12 de ce matin il y a un verset particulièrement intéressant qui, à demi-mot, nous parle de cette générosité gratuite : si une partie du corps souffre, toutes les autres souffrent avec elle, et si une partie du corps est glorifiée, toutes les autres se réjouissent avec elle ! Quoi de plus généreux que de déjà être là, présent, en partage de vie  en compassion, en soin, en attention ! Sommes-nous si peu généreux que ça dans notre monde pour ne même plus souffrir avec celles et ceux qui souffrent et pour ne plus se réjouir pour celles et ceux qui sont heureux ?

La générosité : dans une société du donnant donnant nous faisons très très rarement quelque chose gratuitement ! Oui je veux bien te rendre un service, mais tiens en échange si tu pouvais… phrase tellement commune ! Il est question de la posture que nous occupons avec l’autre, dans quelle situation le mettons-nous ? Quand on parle de générosité il ne s’agit pas de la quantité qu’on donne, Jésus n’en parle pas, il s’agit d’une manière d’être avec l’autre où on ne le met pas dans une posture à devoir rendre quelque chose, mais être simplement avec l’autre !

Donner sans rien attendre en retour, donner de son argent certes (on y reviendra tout à l’heure), mais donner aussi de son temps, de ses talents, de ses compétences, de sa compassion, de son écoute ! Être là avec l’autre en toute simplicité ! Dans une société où tout se paye, tout se rend, tout se compte et se monnaie, peut-être qu’on a vraiment besoin d’entendre cet appel à la générosité et à la gratuité que nous lance Jésus ! Si au moins nos relations à l’autre, à la nature et à Dieu aussi, pouvaient être uniquement sur une base de générosité gratuite, alors notre monde se permettrait peut-être un peu plus d’humilité !

Voici donc le dessert : la générosité gratuite !

Oui, comme on peut le voir, ce sont de petites questions pour nos vies que nous pose Jésus ce soir : quelle relation d’honnêteté ai-je de moi à moi ? quelle relation d’humilité ai-je face à l’autre ? quelle relation de générosité ai-je avec les autres ?

Oui, ces 3 passages ensemble nous parle de notre manière d’être soi, d’être à l’autre et d’être avec l’autre !  

Voilà donc la recette parfaite de l’être ensemble pour le bon fonctionnement du corps du Christ ! Une entrée d’honnêteté, un plat en toute humilité et un dessert d’une générosité gratuite !

En cette nouvelle année qui s’ouvre devant nous, nous allons cheminer ensemble, les uns avec les autres, pour grandir et faire grandir cette Eglise, ce quartier, ce monde, soyons fous (et humbles…) !  Mais nous allons aussi faire face aux difficultés que nous rencontrons et que nous allons rencontrer dans les mois à venir face aux divers conflits qui éclatent dans le monde, face à la montée des prix de partout, face à la précarité grandissante et face à celles ceux qui essayent de survivre, je nous invite à garder ces enseignements du Christ pour nos vies, pour nos vies à chacun et chacune, et pour notre vie d’Eglise aussi ! Une entrée d’honnêteté, un plat en toute humilité et un dessert d’une générosité gratuite !

Allé, A table maintenant !!

Amen.

Sophie Ollier