Quand Dieu se donne à voir comme un bébé
Lecture : Luc 2, 1-20
Spectacle des enfants : « La folle nuit de l’aubergiste »
ALo - Eh bien, Christian, quelle nuit !
CB - Eh bien, Andreas, quelle folle nuit !
ALo - Du monde, de l’agitation
CB - Depuis l’étable jusqu’au ciel
ALo - Des campagnes jusqu’au bout de la terre
CB - Et jusque dans la chambre des aubergistes
ALo - Tout ça pour un bébé
CB - Eh bé…
ALo - Non, un « bébé »
CB - Oui, un bébé. Je dis « eh bé », parce que je suis du midi et que c’est comme ça qu’on dit « eh bien », « ça alors »… C’est une marque d’étonnement.
ALo - Eh bé ?
CB - Oui, eh bé tout ça pour un bébé !
ALo - Aux Pays-Bas, on ne dit pas eh bé, on dit « allemachtig ».
CB - Allemachtig ?
ALo - Oui, allemachtig
CB - Je disais donc : eh bé, un bébé…
ALo - Oui, tu peux être étonné : c’est étonnant, quand on y pense, qu’à Noël nous fêtions Dieu dans un bébé. C’est étonnant, Dieu qui a voulu naître parmi les hommes. Dieu qui est venu vers nous dans un bébé. Dieu, le Créateur du ciel et de la terre, qui se donne à voir et à rencontrer dans un bébé.
CB - Allemachtig ! Tu sais, quand j’y pense, ce qui est surprenant, c’est qu’un bébé est fragile et surtout très dépendant. Sans l’aide de ses parents un bébé ne peut pas survivre. Il a besoin de ses parents pour tout. Quand Dieu se donne à voir dans un bébé c’est quand même le monde ou la religion à l'envers ! Parce que pour les hommes Dieu a toujours été le plus puissant, plus puissant que tout. S’il a créé l’univers il doit bien être puissant au-delà de tout. Or, Dieu a voulu naître parmi les hommes comme un tout petit, faible et fragile. C'est quand même étonnant ! Moi, je m’émerveille devant cette étonnante humilité de Dieu. Le plus fort accepte, de lui-même, d’être faible et petit ! Il refuse d’écraser les autres de sa puissance. Au contraire, il crée ainsi un espace pour les autres, pour chacun de nous, en devenant lui-même petit. Qu’est-ce que tu en penses, Andreas ?
ALo - Pour moi, cela veut dire aussi que Dieu, en devenant lui-même un tout petit, s’identifie avec les petits, les plus petits et les plus faibles et fragiles. Dieu nous dit de cette manière ce qui est important pour lui : se rendre proche et solidaire des petits et des faibles, de tous ceux qui ont besoin qu’on s’occupe d’eux, qui ont besoin de protection, d’amour, d'une main tendue, de solidarité. Dieu nous montre ainsi, je pense, un aspect très important de son amour pour les hommes : un amour qui se veut solidaire des plus fragiles sur terre. Il introduit une autre loi dans nos vies que la loi du plus fort. Il introduit la loi de la solidarité avec ce qui est fragile et faible. C'est cela qui rend l'homme humain et Dieu nous le dit à travers ce bébé.
CB - Autre chose : pour les hommes Dieu est bien celui qui est invisible, parce que personne ne l’a vu. C’est peut-être pour cela qu’il y a tellement de religions et de discours sur Dieu : personne n’a vu Dieu. Les hommes ont sans doute beaucoup fantasmé sur Dieu dans l’histoire, dans les mythes et les diverses religions. Mais pour les chrétiens, Dieu est venu vers nous et s’est laissé voir dans un bébé et dans toute la vie de Jésus. Nous avons vu Dieu… c’est incroyable ! Nous l’avons vu dans la vie d’un homme et cet homme était Jésus. Voilà une chose étonnante qui fait la différence entre le christianisme et les autres religions !
ALo - C'est vrai et c’est bien Jésus lui-même qui l’a dit : celui qui m’a vu a vu le Père, a vu Dieu. On peut toujours encore beaucoup fantasmer sur Dieu mais nous chrétiens nous disons : regarde Jésus et tu sauras qui est Dieu. Regarde Jésus et tu comprendras l’amour de Dieu pour nous.
CB - Oui, et ceci aussi m’émerveille : quand je pense au bébé de Bethléem, je me dis que notre Dieu s'est lié profondément à notre humanité et que rien d’humain n’est étranger à notre Dieu. Ainsi il est devenu proche de nous, le plus proche possible... au lieu de rester loin de nous, loin dans son ciel. Il a voulu ainsi mieux entrer en relation avec nous, mieux communiquer avec nous et se faire comprendre par nous. Sinon on aurait continué à fantasmer sur Dieu encore longtemps et un peu dans tous les sens.
ALo - Encore une chose : que Dieu vienne vers nous dans un bébé veut dire aussi qu’il vient vers nous totalement désarmé. On n’a rien à craindre d’un bébé, un bébé est sans violence aucune, il est dépendant des autres ; il a besoin qu’on prenne soin de lui, qu’on l’accueille, qu’on l’aime. Dieu veut que nous l’accueillions, que nous l’aimions, peut-être même que nous prenions soin de lui. C’est ce qu’a pu écrire Etty Hillesum, une femme juive qui nous a laissé un journal très émouvant avant de mourir à Auschwitz en 1944 : "Dieu, tu as besoin que je m’occupe de toi au fond de moi-même pour que tu puisses vivre en moi, pour que tu puisses naître en moi". Dieu veut naître aussi en nous. Dieu veut habiter en chacun de nous, par son Esprit, par Sa Présence et son action en nous. C'est quand nous aimons à sa manière que Dieu naît en nous.
CB - Tu sais, Andreas, un Dieu qui se donne dans la fragilité, qui se fait proche des plus faibles, qui se donne à voir en Jésus, qui s’offre désarmé à notre foi… Eh bé ! C’est vraiment étonnant, Noël ! Dieu est vraiment étonnant ! Mais, parfois, je me demande si nous sommes encore capables d’étonnement…
ALo - Alors comment pouvons-nous encore nous étonner sur la fête de Noël et ce Dieu qui vient se révéler à nous dans l’enfant de Bethléem ?
CB - Moi, je me dis qu’il faut le laisser grandir en nous. Un bébé, avant sa naissance, se développe dans le ventre de sa mère. Il y a le temps d’une grossesse, neuf mois. Temps d’attente, temps d’espérance. Dans l’Eglise nous prenons le temps de nous préparer à la fête de Noël : les quatre semaines de l’avent servent bien à cela ; pour nous chrétiens, c’est un temps de préparation. Par la liturgie quand nous allumons une bougie nouvelle chacun des 4 dimanches avant Noël, par la méditation de textes bibliques comme les annonces du Messie dans le premier Testament ou par l’ange Gabriel à Marie, par les beaux chants du temps de l’Avent… Tout cela nous oriente déjà vers Noël. Ainsi notre regard et notre cœur se tournent petit à petit vers cette naissance de l’enfant de Dieu. Profiter chaque année de ce temps de l’Avent nous aide à entrer dans l’émerveillement et la joie.
ALo - Un bébé, c’est aussi du temps après sa naissance, quand il s’agit de l’accueillir, de le voir grandir, d’entrer en relation avec lui. Noël, c’est encore après Noël. Quand tout le monde après Noël pense déjà à la fête de la St Sylvestre, au réveillon de fin d’année, et passe à autre chose, l’Eglise nous invite à méditer plusieurs semaines encore le récit de Noël, par exemple avec le récit des mages au début janvier. Ainsi le chrétien laisse résonner encore plusieurs semaines dans son cœur le récit de la naissance de Jésus là où le monde est déjà passé à autre chose.
CB - En fait c’est un peu Noël chaque jour… Et puis le bébé est une personne, unique, singulière, avec qui on entre dans une relation qui se construit jour après jour. Jésus, cela veut dire « Dieu sauve ». Jésus est celui avec qui on peut entrer en relation, et qui nous met en relation avec Dieu.
ALo - Mais, Christian, comment rester dans l’émerveillement devant ce Dieu qui naît parmi les hommes comme un bébé ?
CB - Je crois que c’est Jésus lui-même qui nous aide à nous étonner sur Dieu ; c’est bien Jésus qui nous apprend qui est Dieu et qui corrige nos fausses idées sur Dieu. C’est bien dans la vie de Jésus que nous découvrons combien Dieu est humble et prêt à partager notre quotidien. Jésus n’a-t-il pas vécu dans un village au milieu des hommes en travaillant comme charpentier, en partageant la vie des hommes, la vie de tous les jours ? Tout cela peut nous apprendre comment Dieu veut être proche de nous, au milieu de nous, avec nous.
ALo - Oui, c’est la vie de Jésus qui nous dit à chaque étape de sa vie qui est Dieu pour nous, et le plus grand étonnement est peut-être qu’il meure sur la croix. Ce Dieu qui va jusqu’à mourir par amour pour nous, par le don de sa propre vie, est quand même quelque chose, ou plutôt un Amour, dont nous n’avons jamais fini de nous étonner.
CB - Et nous n’avons jamais fini d’être surpris par ce Dieu qui ressuscite au matin de Pâques, qui nous entraîne dans une vie renouvelée. Quel étonnement, et quel émerveillement quand chaque jour nous vivons des petites résurrections !
ALo - Sa présence dans notre vie
CB - Sa vie dans notre auberge
ALo - Dans notre nuit
CB - Dans notre agitation
ALo - Dans notre envie de paix
CB - Dans notre quotidien
ALo - Chaque jour
CB - Tous les jours
ALo - Eh bé !
CB - Allemachtig !
ALo + CB - Amen.